Le boom de la livraison de proximité en Chine

Le boom de la livraison de proximité en Chine

Le boom de la livraison de proximité en Chine 1678 1119 Altavia

Directement issu du e-commerce, le marché de la livraison du dernier kilomètre s’est considérablement développé en Chine. Estimé à plus de 250 milliards de dollars en 2018, il traduit un véritable changement comportemental des consommateurs, désormais habitués à se faire livrer tout type de produits, à tout moment. Décryptage avec Stéphane Joly, directeur grands comptes chez Altavia.

Tout se faire livrer, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. C’est désormais la norme en Chine, où des millions de clients ont vu leur rapport à la livraison changer avec la digitalisation de l’offre. Le marché de la livraison de proximité a explosé : sa croissance (56% de 2017 à 2018) est plus de deux fois supérieure à celle du e-commerce lui-même (+24%).

 

« Les points de vente se doivent d’être ouverts quasiment 24H/24, pour servir un client, insaisissable, qui peut commander un repas à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, commente Stéphane Joly. Désormais, dans les restaurants, un chef est présent, du matin au soir, prêt à s’activer en cuisine pour chaque commande reçue. »

 

3 grandes sociétés de livraison à domicile

3 géants se partagent le monopole de la livraison du dernier kilomètre en Chine, incarnant la guerre féroce que se livrent Alibaba et Tencent.

 

Ele.me (Alibaba) : la plateforme, dont le nom signifie « T’as faim ? » en mandarin, est utilisée par 170 millions d’internautes et effectue des livraisons pour Starbucks, Watsons (parapharmacie), des cinémas, des restaurants…

 

Koubei (Alibaba) : le site compte 160 millions d’utilisateurs. On peut y réserver des places de cinémas, des soins en SPA, y commander des repas…

 

Meituan (Tencent) : cette entreprise, à l’origine spécialisée dans la vente en ligne groupée, s’est considérablement développée et propose également toute sorte de livraisons.

 

« Tous les points de vente, restaurants, cinémas etc, peuvent s’inscrire sur ces plateformes, quelle que soit leur taille, indique Stéphane Joly. Ils paient, en contrepartie des millions de clients potentiels auxquels ils accèdent, une petite redevance pour chaque transaction effectuée. Pour le client final, la livraison est gratuite. »

 

 

Un repas livré en moins de 30 minutes

La livraison de repas est totalement rentrée dans les mœurs et les consommateurs chinois peuvent y avoir recours plusieurs fois par jour. Une fois la commande passée sur l’une des plateformes, il faut compter 30 minutes maximum pour recevoir son repas, prêt à être dégusté. « Ce qui est étonnant en Chine, c’est qu’il n’est pas rare de voir des chiffres d’affaires quasiment à l’équilibre entre la restauration physique et les livraisons ! »

 

 

Se plier au nouveau diktat

Tous les retailers physiques sont désormais contraints de proposer, eux-aussi, un service de livraison efficace et réactif. Auchan-RT-Mart, Carrefour-Suning, Hema (Alibaba) se plient à ce nouveau diktat de la consommation. « S’ils veulent survivre, les retailers n’ont d’autres choix que de s’inscrire sur Ele.me, Koubei ou Meituan, pour bénéficier d’un trafic de plus de 150 millions d’utilisateurs. Il s’agit ensuite d’être irréprochable : les avis et les commentaires des consommateurs postés sur les plateformes peuvent en effet être dévastateurs s’ils sont négatifs. »

 

 

Un marché plein d’avenir

Si cette nouvelle manière de consommer représente un coût pour chaque plateforme (personnel, packaging, transport…) et que les « super apps » comme Ele.me, Koubei et Meituan sont loin d’être rentables (mais pour autant valorisées à plusieurs dizaines de milliards de US$), les volumes de livraison de proximité sont tels que le marché n’est pas prêt de s’essouffler. Les milliers de livreurs (sans statut social !) continueront encore longtemps à prendre des risques au volant de leur mobylette pour livrer chaque repas en moins de 30 minutes. Et que dire des tonnes d’emballages plastiques, transformés en seulement quelques minutes en déchets que l’on ne peut pas recycler ? Espérons que cet enjeu environnemental fera bientôt l’objet d’une réflexion plus poussée, à la recherche d’alternatives viables.